Entrée : Agir sur le monde : Agir dans la Cité : individu et pouvoir
Problématique : Pourquoi les récits dystopiques prévoient-ils le pire ?
Citation : « Les prophéties ne s’accomplissent que si quelqu’un a le courage de les réaliser. » Marie Vareille (née en 1985)
Séquence 7 : Sociétés imaginaires
Illustration
Séance 1 : Analyser l’incipit
Texte : Dans la forêt, Jean Hegland, 1996
Objectif : lecture analytique
Questions des pages 280-281 :
1/ La narratrice est une jeune fille car on lit qu’elle est « surprise ».
2/ a/ La narratrice vit à la campagne, aux Etats-Unis, avec sa sœur.
b/ Elle et sa sœur sont « orphelines ».
3/ douleur, inquiétude et étrangeté.
4/ Elle se met à écrire afin de témoigner de son expérience des événements qui touchent le pays.
5/ Oui, oui, oui, oui, oui, oui.
Non, non, non, non, non, oui.
b/ Cela est un événement d’ampleur mondial : plus de communication, plus d’approvisionnement, d’avions… cela peut-être expliqué par une épidémie, une catastrophe naturelle, une guerre…
6/ « Ce Noël-ci, il n’y a rien de tout cela. » « il n’y a plus de magasin ». On comprend qu’il n’y a plus d’électricité, ni téléphone… Cette fiction nous interroge notre dépendance à la société de consommation.
7/ a/ Lignes 1 à 8 : présent ; 25 à 41 : futur ; 42 à 50 : passé composé et imparfait.
b/ La narratrice présente le monde dans lequel elle évolue au moment de l’écriture, le futur pour envisager ses études, et ce que le monde était.
8/ La narratrice pense avoir droit à une vie normale. Elle souhaite suivre de hautes études et vivre dans le confort.
Séance 2 : Caractériser la tonalité du récit
Texte : Dans la forêt, Jean Hegland, 1996
Objectif : lecture analytique
Chapitre 7 : page 282 et 283
1/ La mère est protectrice et prudente.
2/ Le père est comparé à un arbre : « imposant, aussi patient et bienveillant qu’un arbre. » Cela traduit unr forme de sagesse, il est protecteur, une force mais pas menaçante.
3/ Le pronom « nous » souligne la fusion entre les deux sœurs.
4/ C’est le mot « forêt » qui entraîne Nell dans ses souvenirs d’enfance.
5/ Les deux petites filles avaient l’habitude de jouer dans la souche d’un séquoia.
6/ a/ Les petites filles désiraient aller dans la forêt afin d’explorer, de construire un fort, s’amuser différemment, s’aventurer. Il s’agit aussi ici de transgresser l’interdit maternel.
b/ Elles n’avaient pas peur de la forêt car sont insouciantes, curieuses, courageuses, leur père les a initiées.
7/ La relation entre les deux sœurs s’est distendue car Eva a commencé la danse et elle n’a plus le temps.
8/ Nell s’est détournée de la forêt car sans sa sœur, cela devient enfantin, les rares fois où elles y vont ensemble, elles s’énervent, elle a grandi et ne prend plus trop de plaisir. Elle est peut-être plus consciente du danger. La forêt représente désormais une distance entre la maison et la ville.
9/ Nell imaginait son avenir en ville, en suivant ses études à Harvard.
10/ a/ Au moment de l’écriture, Nell est enfermée dans la maison.
b/ Les réserves de nourriture diminuent, de plus il pleut beaucoup donc cela rend les ressources inaccessible.
12/ Bilan : nostalgie ; confortable ; aimante ; sœur ; forêt ; ville ; avenir.
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Séquence 6 : Antigone ou du jusqu’au-boutisme.
Entrée : Vivre en société, participer à la société : Dénoncer les travers de la société
Problématique : Pourquoi réécrire un mythe antique ?
Citation : « Dans le drame, on se débat parce qu’on espère s’en sortir. » Jean Anouilh
ILLUSTRATION
Séance 1 : Théâtre
Texte : Antigone, Jean Anouilh, 1946
Objectif : réactiver les connaissances sur le théâtre et repérer les spécificités du théâtre contemporain
Théâtre : lieu, genre littéraire. On pense aux costumes, au décor, au metteur en scène, dramaturge, comédien, interprétations, côtés jardin et cour, artistique...
Le théâtre prend ses sources dans l'Antiquité. Chez les Grecs, la tragédie (tragôidia), c'est le chant du bouc – tragos, bouc, et ôidé, chant.
Les didascalies (indications scéniques) sont écrites en italique et donnent des indications sur la façon de jouer, de parler...
Un personnage s'exprimant seul : un monologue ; deux personnages ou plus discutant ensemble : dialogue.
Il y a une double-énonciation, au théâtre : le comédien s'adresse à un ou plusieurs comédiens mais aussi au public. Et parfois, le comédien s'adresse juste au public : c'est l'aparté.
Antigone est une pièce de Sophocle écrite en -441 av. J.-C.. Nous en lisons l'adaptation de Jean Anouilh qui la modernise en 1942.
Séance 2 : la tragédie et le destin
Objectif : comprendre l’importance de la notion de destin dans la tragédie.
Support : Récit de Jonas. Prologue de la tragédie.
Par écrit, chercher quels éléments semblent faire d’Antigone un roman policier dans ce texte.
Ici, il y a un cadavre, une personne recherchée. Une enquête est donc lancée. Il y a des gardes, des témoins. Une loi a été transgressée. L'enquête mènera vers un procès si le coupable est retrouvé. On reproche au coupable d'avoir offert une sépulture à un « traître » de Thèbes. Ce qui est contre la loi de Créon.
Un garde, Jonas, vient raconter ce qu'il a vu tout en s'innocentant. Il est stressé, a peur d'être jugé et avance le fait d'être père pour espérer la clémence du roi. Il rapporte les faits avec beaucoup de détails.
Les faits se sont déroulés durant la nuit : l'atmosphère est donc propice. L'arme du crime a été retrouvée : une pelle d'enfant.
Le garde met beaucoup de temps à rapporter le « crime », ce qui crée du suspense.
Nous savions qu'Antigone était sortie de nuit et était triste et réaliste quant à son avenir (« aujourd'hui, je ne dois pas être petite »). Le spectateur sait qu'Antigone va mourir.
Nous pouvons écarter la comparaison avec le policier dans la mesure où ici, nous connaissons déjà la coupable et savons qu'elle va mourir
Séance 3 : Antigone face au tyran
Supports : "Dialogue entre Antigone et Créon", Antigone, de Jean Anouilh (1944).
Objectifs : lecture analytique
1/ Quelle image Créon donne-t-il de son rôle de roi ?
2/ Que signifie dire « oui » pour Créon ? Pour Antigone ?
3/ Comment comprenez-vous la réplique d’Antigone aux lignes 69 – 70 ? (ANTIGONE. - Pauvre Créon ! Avec mes ongles cassés et pleins de terre et les bleus que tes gardes m’ont fait aux bras, avec ma peur qui me tord le ventre, moi je suis reine.)
4/ Quelle leçon doit-on tirer de cette confrontation ?
1/ Créon dit que son rôle de roi est pénible et qu'il est obligé de faire des choix difficiles. Il sait avoir le mauvais rôle et réaliser des choses par obligation. Il donne l'image d'un roi dur pour faire régner la loi. Les règles du métier l'empêchent de devoir être toujours honnête et juste.
2/ Dire « oui » pour Créon, c'est faire preuve de courage et faire des choses même s'il n'en a pas envie. C'est savoir mettre son éthique de côté pour le peuple. Tandis que pour Antigone, dire « oui » c'est céder à la pression, c'est parfois être lâche, devoir obéir à des règles parfois injustes. C'est comme vendre son âme au diable et dire « non » pour elle, c'est être libre.
3/ Cette phrase indique qu'Antigone se sent une gouvernante plus juste. Elle se dit reine car elle fait ce qu'elle a envie, sans peur du jugement, contrairement à son oncle Créon. Même amochée, blessée, torturée, elle est reine d'elle-même. Son honneur et son éthique ont beaucoup de valeur à ses yeux, plus que son corps et sa vie.
4/ Malgré le pouvoir de Créon, qui peut la mettre à mort, Antigone reste fidèle à ses principes. Sa vie lui importe peu comparée à la justice qu'elle réclame. Les deux points de vue se défendent et cela montre qu'il n'y a pas de vérité universelle.
Séance 4 : Du bonheur
Texte : Antigone
Objectif : s’interroger sur la question philosophique du bonheur
Fiche.
Activité 1 : Travaux de groupe + définition du bonheur selon chaque personnage
Antigone parle de son bonheur de façon originale. Presque comme si c'était l'Antigone du futur qui parlait : ligne 17, elle parle d'elle à la troisième personne. Elle définit le bonheur de façon clair : il s'obtient en restant soi-même. Elle fait référence à son frère Polynice en parlant de « laisser mourir » quelqu'un d'autre. C'est une grosse vague pour elle. Vivre de ce pour quoi elle se bat, ne rien faire de ce qui ne lui plaît pas.
Tandis que pour Créon, le bonheur réside dans les petites choses du quotidien : un livre, un enfant qui joue à nos pieds. Il compare le bonheur à une eau que les jeunes gens laissent couler entre leurs doigts (métaphore). Pour lui, les jeunes passent à côté du bonheur. Créon est un peu banal, commun, Antigone est unique, originale. Il se base sur la vitesse, il faut prendre ce que la vie nous donne tant qu'il est temps. Le mariage est une condition du bonheur. Antigone personnifie le bonheur et sa vie que Créon lui propose, qui vont « passer sur Hémon » avec « son usure ».
Deux visions du bonheur s'opposent : celle visant au carpe diem, d'une sorte de vieux sage, profitant des petits bonheurs fugaces proposées par l'existence. Pour Antigone, le bonheur doit être entier, absolu, constant.
Séance 5 : La tirade de Créon
Texte : Antigone, Anouilh
Objectif : lecture analytique
Brouillon : beaucoup de métaphores (filées, sur l'équipage : « la barque », « petit radeau », « le mât », « les voiles ») ; Créon dit que chacun pense à soi, pourtant tout le monde dépend de tout le monde, c'est contradictoire ; lui en tant que roi, il ne peut pas abandonner, partir, tandis que les autres peuvent partir ; antithèse soulignée par la construction (de comprendre, essayer, toi VS moi) ; Essaie = impératif présent, donne des ordres, il force Antigone ; Créon est l'homme de la situation, parce qu'il considère avoir raison, il s'en est persuadé ; il compare la ville à un bateau, l'équipage serait le peuple et lui est le capitaine ; il est conscient d'avoir le mauvais et accepte de se sacrifier ; il fait des choses contre son gré mais par devoir ; champ lexical du naufrage (le mât craque, le vent siffle, les voiles vont se déchirer = la chute du royaume, si le capitaine abandonne son poste) ; en disant cela, on a l'impression qu'il est le seul digne pour gouverner (il se jette des fleurs? Du moins il justifie sa position par rapport au cadavre de Polynice) ; il dit se sentir choisi sans avoir eu forcément les épaules, le pouvoir semble être une charge ; Créon est un homme qui est capable de compromis pour le bien de tous
Dans cette tirade, Créon apparaît comme l'opposé de sa nièce. Lui a dit « oui ». Il essaie de faire comprendre à Antigone sa position. L'antithèse de leurs personnalités est soulignée par une phrase où la structure presque parallèle les oppose : « Essaie de comprendre une minute, toi aussi, petite idiote ! J’ai bien essayé de te comprendre, moi ». Le verbe « essaie » est à l'impératif : Créon donne des ordres, force Antigone. Dans ses phrases, il y a une métaphore filée de la mer, avec l'omniprésence du lexique maritime : « la barque », « petit radeau », « le mât », « les voiles »). Il compare la ville de Thèbes à un navire dont l'équipage serait le peuple et l'aurait pour capitaine. C'est l'homme de la situation selon lui, il se convainc d'avoir raison. Mais Créon sait avoir le mauvais rôle et accepte de se sacrifier. Il fait certes des choses contre son gré, mais par devoir. Il explique qu'en tant de roi, lui ne peut pas fuir comme les lâches. On a l'impression que lui seul est digne de gouverner (comme s'il justifiait, aux yeux d'Antigone, sa position par rapport au cadavre de Polynice). Il dit avoir été destiné à ce poste, sans toutefois en avoir les épaules. Le pouvoir semble être une charge. D'ailleurs, l'emploi du lexique du naufrage montre ce qui se passerait selon lui s'il abandonnait (« le mât craque », « le vent siffle », « les voiles vont se déchirer »). Créon nous montre qu'il est un homme capable de compromis pour le bien de tous et, en cela, a une conception noble de la royauté et du pouvoir.
Nous remarquons que l'eau, qui était ce que les jeunes devaient retenir entre leurs mains pour être heureux, peut aussi être ce qui détruit.
Séance 6 : Dialogue impossible
Texte : Antigone, Anouilh
Objectif : lecture analytique
Dialogue entre Antigone et le garde ; De "ANTIGONE : Tu crois qu'on a mal pour mourir ?" à "Oui, c'est une drôle de lettre."
Brouillon : Antigone sait qu'elle va mourir et rédige une lettre à son fiancé ; lettre d'adieu laborieuse, mais elle fait tout rayer à la fin et fait écrire quelque chose de plus simple ; elle évoque l'enfant qu'ils auraient pu avoir ; elle a peur de mourir et regrette ce qu'elle a fait (« tu crois qu'on a mal pour mourir ») ; Antigone est seule (face à la loi, à sa famille, à la mort) ; le garde est un personnage cupide, craintif de Créon et a peur pour son avancement, très détaché, égoïste, manque d'humanité ; il peine sous la dictée, comme un élève qui a du mal à suivre ; Antigone s'excuse d'avoir existé, se voit comme la source du problème, parle d'elle à la troisième personne, comme si elle était déjà morte ; Antigone épouse la mort (Ô lyrique, Ô tombeau, ô lit nuptial) ; une drôle de lettre → le détachement du garde fait que la lettre s'écourte et la lettre qui devait être belle et dramatique devient pratique et un simple pardon ; l'absurde car elle meurt un combat auquel elle ne semble plus croire ; elle dit que Créon avait raison
Dans ce dialogue de sourds, Antigone sait qu'elle vit ses derniers instants et demande au garde de rédiger une lettre à l'attention d'Hémon. Le garde ne veut pas : cela nuirait à son avancement ou le condamnerait à mort. Mais quand elle lui propose sa bague en or, il s'arrange avec ses principes. Cette lettre est laborieusement rédigée, sous la copie, ce qui donne à la scène une tonalité comique alors que le moment est censé être tragique. Il écrit sous la dictée, lentement, comme un élève. Ce garde est vraiment odieux, il n'a pas d'empathie et annonce froidement à Antigone comment elle va mourir, ramène tout à lui, est cupide... Nous voyons qu'Antigone, pour la première fois, regrette et a peur. Elle demande si « on a mal pour mourir ». Elle évoque dans la lettre son amour pour Hémon, l'enfant qu'ils auraient pu avoir et parle d'elle à la troisième personne, comme si elle était déjà morte, loin. Antigone épouse ici la mort, avec cette métaphore : « Ô tombeau, ô lit nuptial ». Cette lettre d'abord élancée finit de façon pragmatique avec un simple pardon (pardon d'avoir existé). Elle se décrit seul face à tous (« Sans la petite Antigone vous auriez tous été bien tranquilles »).
Antigone, c'est le personnage tragique, seule face à la loi, seule face à sa famille, seule face à la mort. Elle semble dire que Créon avait raison (terrible désaveu). Sa mort est absurde : pourquoi mourir quand on ne croit plus aux raisons que l'on s'était données ?
Séance 7 : Rupture avec Hémon
Texte : Antigone, Anouilh
Objectif : lecture analytique
Brouillon : elle change de temps (futur pour parler de la mort, le conditionnel pour évoquer le futur qu'elle aurait souhaité) ; ce futur n'est plus possible, car elle a choisi de mener son combat, qui l'a condamnée ; si elle avait été mère, elle dit à Hémon qu'elle aurait été protectrice, plus que toute autre mère ; elle répète l'adverbe « jamais » qui montre que leur mariage est impossible ; elle se compare à sa sœur, qu'elle décrit comme la fille parfaite alors qu'elle manque de soin ; elle demande à Hémon s'il regrette de l'avoir choisi plutôt qu'Ismène ; Antigone se « déguise » en Ismène, ce qui fait rire Hémon et ils se disputent (elle lui reproche de ne pas avoir senti le sacrifice consenti pour rentrer dans les canons de la beauté) ; dans sa tirade, Antigone menace Hémon de se défenestrer s'il approche ; elle lui dit qu'il aura la réponse demain, dans quelques heures (gradation descendante, soulignant le peu de temps qu'il lui reste) ; elle l'empêche de répondre, elle l'oblige de sortir dès qu'elle aura fini ; Antigone est directe, affirmée, alors qu'Hémon est plus faible
Dans ce dialogue entre Antigone et Hémon, le spectateur assiste à une rupture sollicitée par la jeune fille (la suite va être dure – elle va mourir – et elle souhaite préserver son fiancé). Elle évoque le soir du bal, de la rencontre et des sacrifices consentis pour plaire à Hémon. Elle a volé la robe d'Ismène, son parfum et s'est donc déguisée en sa sœur (qu'elle décrit comme la femme par excellence). Hémon a ri au contraire (sans doute amusé) et Antigone l'a mal pris et ils se sont disputés (« mon mauvais caractère a été le plus fort »). Elle lui demande s'il ne regrette pas d'avoir laissé Ismène pour elle, mais Hémon l'aime. Alors la jeune fille emploie le conditionnel, pour évoquer le futur heureux qu'ils auraient pu avoir ensemble (un enfant, dont elle aurait été la mère protectrice) et le futur quand elle parle sans la mentionner de sa mort. Nous comprenons que ce futur n'est plus possible : elle a choisi entre son combat et son amour. Antigone devient alors ferme (elle veut que ça aille vite pour ne pas avoir à s'effondrer) et force Hémon à se taire et à sortir une fois qu'elle aura tout dit. Elle lui dit qu'il saura « demain (…) tu sauras tout à l'heure » (c'est une gradation descendante qui souligne l'imminence de sa mort). Elle le menace de se défenestrer s'il la coupe.
Conclusion : le personnage d'Antigone, héroïne tragique, est ici très affirmée et fort, face à un bien faible Hémon.